Pourquoi les journalistes ne posent jamais les bonnes questions ?
Je ne résiste pas à reprendre l’article de Daniel Schneidermann, que j’adore. Surtout qu’il confirme mon analyse tout en étant plus optimiste, du moins, d’un point de vue de gauche, car il n’évoque ni la possible déstabilisation de la gauche suite à une défaite présidentielle, ni la possibilité d’une alliance sous marine de Bayrou avec la droite. Il s’agit juste de préciser à tout ceux qui sont hypnotisés par l’élection présidentielle comment marche réellement le système électoral en France.
Et de finir aussi sur un constat : pourquoi les journalistes ne font-ils pas ce travail de pédagogie ? L’actualité devient un jeu plein de suspens, de passions, de rebondissement, mais, malheureusement, basé sur peu de réalité et d’analyse. C’est un peu dommage, mais bon, on nous dit que c’est comme cela que les français se passionnent pour la politique. J’espère que c’est vrai, que les spectateurs de « J’ai une question à vous poser » venaient plus pour écouter les programmes plutôt que vérifier si les candidats ne se prenaient pas les pieds dans le tapis…. j’ai quand même un doute.
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Une pincée de Bayrou-fiction
Sujet de méditation dominicale pour jeune électeur
samedi 25 février 2007, Daniel Schneidermann
Discussion dominicale, avec un jeune électeur, qui va voter pour sa première présidentielle. Enfin, voter peut-être. Et peut-être non. Tu comprends papa, tous leurs programmes, tous leurs promesses, chaque jour des nouvelles promesses, je n’y crois pas, c’est n’importe quoi.
Ah. Alors tu vas voter Bayrou ? C’est celui qui fait le moins de promesses.
Oui. Bayrou. Ou blanc, je ne sais pas encore. Je vais voir.
Mais tu les as lus, leurs programmes ?
Non. Pas envie. Pas envie de m’impliquer là-dedans.
Bien. Bayrou, donc. En attendant que tu lises, parlons donc de Bayrou. Le dimanche, c’est fait pour ça. Décanter en famille le trop-plein de la semaine. Se poser deux secondes, et réfléchir.
D’abord, disons-le, au risque de me faire suspendre, Bayrou, dans la bande des trois, ne m’est pas le moins sympathique. Un gars qui vole dans les plumes de Claire Chazal, de Bernard de la Villardière, et de Patrick Le Lay, même si son dessillage a été un peu tardif, ne peut pas être tout à fait inintéressant.
A propos de l’hypothèse Bayrou, je suis pourtant frappé par l’incuriosité médiatique sur un point particulier, mais important.
Supposons Bayrou élu le 6 mai. Sarko et Ségo sont pulvérisés. Tremblement de terre dans la vie politique. Très bien.
Que se passe-t-il le 7 mai au matin ? Le nouveau président nomme un gouvernement de transition avant les législatives, avec toute une bande de chouettes copains, Borloo, DSK, Kouchner, l’abbé Pierre (ah non, flute), Nicolas Hulot, les Don Quichotte, Steevy, etc. Très bien pour la photo.
Mais prenons par exemple le cas de Borloo et DSK. Non, Borloo est un mauvais exemple, il n’est pas à l’UMP. Supposons plutôt un UMP tout prêt à travailler avec le nouveau président. Disons, Copé (c’est une supposition, hein. Je ne sais rien des intentions de Copé, mes déjeuners avec lui sont regrettablement espacés. C’est juste pour le cas de figure, et pour pousser le raisonnement).
Copé et DSK, pour devenir ministres, demandent-ils, et obtiennent-ils le soutien de leurs partis respectifs ? Je ne sais pas ce que vous en pensez. A mon avis, non. A mon avis, le PS et l’UMP, vaincus dans le sang, n’ont qu’une obsession : faire mordre la poussière au nouveau président aux législatives. Donc, à supposer que Bayrou parvienne à réunir 577 candidats, et à les estampiller majorité présidentielle, chacun de ces 577 candidats trouve en face de lui, dans chaque circonscription, un UMP et un socialiste, sortant dans la plupart des cas, bien implanté, et décidé à lui faire bouffer des pneus de tracteur.
Dans ces conditions, combien de députés bayrouïstes peuvent-ils espérer être élus en juin ?
Tout est possible. On peut imaginer un scénario à la 1981, et une « vague béarnaise ». Dans ce cas-là, tout va bien pour le nouveau président. Le PS et l’UMP explosent, Bayrou crée un « grand parti du président », tout se recompose, parfait.
Mais sinon ? Si le nom de Bayrou fait sortir des urnes, au maximum une centaine, voire deux cent députés, que se passe-t-il ? Avec quelle majorité gouverne-t-il ?
Je m’empresse de dire que je n’en sais rien. La seule chose qui m’étonne, c’est qu’aucun intervieweur professionnel ne pose à François Bayrou cette question-là.
A moins qu’une interview, une déclaration, ne m’aient échappé. Le lien sera le bienvenu. Et François Bayrou, puisque vous êtes internaute, si vous passez par ici…
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(article original avec commentaires et linké)
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