Langue de serpent
Les serpents me fascinent. Peut être parce que c’était le signe chinois de ma belle mère. J’aime leur calme, leur froideur, leur efficacité. De la même manière, les personnes à sang froid m’impressionnent. Avoir du self contrôle, ne pas se laisser surprendre par les émotions, calculer au plus juste en supportant les tensions.
On rêve toujours d’être ce que l’on ne peut être. Se rêver puissant quand on est faible, calme quand on est un surexcité, serein quand on est anxieux, courageux quand on est froussard, imperturbable quand on est émotif…
Avec le temps, on apprend à grandir. Jamais on ne sera un serpent. Certains refusent de l’admettre et chercheront toujours à imiter. D’autres sombreront dans la mélancolie, conscients de leur éternel échec. Mais, c’est en se rendant compte que l’on ne sera jamais un serpent qu’on peut se réaliser et profiter de sa force. Le serpent est certes fort mais il est aussi aveugle et il ne pourrait vivre sans un soleil pour le réchauffer. Imiter les personnes de sang froid, c’est oublier sa spontanéïté, sa gaieté, sa vivacité.
Aujourd’hui je ne veux plus être un serpent. Je me passionne pour les éphémères ou les lucioles. Vous savez ? « Ces mouches de feu qui ressemblent à des graines d’étoiles (Maupassant) ». Vivre intensément, briller pour les autres. En contre partie… disparaître précipitamment ?
Dans le mythe d’Er de Platon, les âmes après la mort ont le choix de choisir leur vie avant de passer dans le fleuve de l’oubli. Tous les choix sont permis mais tous les choix ont leur contre partie. Ainsi, une âme qui choisit hâtivement d’être un tyran s’aperçut trop tard qu’elle aurait pour destin, également, de devoir manger ses propres enfants. Vient le tour d’Ulysse qui, après mûres réflexions, choisit la vie d’un homme simple, ayant pour seule ambition de vivre tranquillement, loin du périple de sa vie antérieure…