De la morale en politique (série : réchauffé)

freche président de région Languedoc roussillon

Les anciennes polémiques

Pour une fois, j’étais en avance sur l’actualité. 15 jours avant la polémique Frèche, je suis tombé sur un article politique sur un blog… de webdesign. J’y ai pris la défense du président de la région Languedoc Roussillon que j’ai appris à connaître lors de mes études à Montpellier et ma militance politique.

Suite à ces attaques racistes, il y avait eu une excellente émission de feue Arrêt sur Image qui concluait que Georges Frêche était un des derniers politiques non politiquement correcte et qui n’a pas la langue de bois. Il parle aux électeurs comme on peut parler de temps en temps à ses collègues ou des amis de longues dates avec des traits d’humour pourris que certains pourraient taxer d’homophobes, ou de sexistes…

Il a le franc parler on dirait, il force les caricatures et arrive en cela à captiver son auditoire.

Maintenant, sortie du contexte local, les mots peuvent heurter il est vrai mais doivent ils forcément provoquer la mise à mort ?

Au delà des mots, ne faut il pas regarder les faits ? Ayant vécu à Montpellier, la ville de frêche, je peux témoigner aisément que l’homme n’est pas raciste. Sa politique a contribué au contraire à ne pas isoler les quartiers les plus défavorisés et ethniquement diversifiés du centre ville. Alors que la politique de son prédécesseur de droite consistait à mettre des arbres entre le quartier sensible de la Paillade et le centre ville, Frêche a fait passer des lignes de bus et la première ligne de tramway. Lors du débat sur le tracé du tramway, il a fallut du courage politique pour faire avaliser ce choix à un lobby commerçant qui voyaient déjà les « jeunes immigrés » briser ses vitrines. Il y a aussi une importante vie culturelle qui contribue à ne laisser personne sur le carreau. Enfin le personnel autour de Georges Frêche est très mixte bien avant tout politique de quotat.

C’est au regard de ce contexte que l’électorat et les socialistes renouvellent systématiquement leur confiance à cet homme malgré ses petites phrases que certains peuvent trouver douteuses mais qui sont une bien moindre chose comparée aux actes.

Non Georges frèche n’est pas raciste. On peut par critiquer sa politique communautariste et regretter son énorme Ego.

Sur la question des harkis et des sous-hommes il s’agit encore d’une référence locale qui ne peut être comprise à Paris. Dans les faits, Frêche s’est retrouvé dans un meeting face à un membre de l’opposition de droite représentant des harkis. Or à cause de son grand égo si on essaye de contester l’opinion du grand Georges on s’expose à des remontrances, voire des insultes. George a ainsi déclaré que cet homme était un sous-homme « car il était à la botte de la droite et on savait comment De gaulle avait réglé le problème des harkis ». Bien entendu, hors de tout contexte, on peut aisément gloser sur des concepts philosophiques. Mais ces gloses ne sont pas acceptées localement car le tempérament de l’homme on le sait est bouillant. Et on le sait tous quand on est bouillant on dit des conneries qui ne sont pas réfléchis et auxquels il ne faut pas donner trop de sens.

Après la question est de savoir si un homme politique doit être irréprochable, être calme, donner une bonne image. On est dans ce modèle quand on scrute à la loupe la vie people des hommes politiques. Mais c’est une certaine conception de la politique. D’autres préfèrent regarder ce qui se fait concrètement en pensant que nulle n’est parfait et que tout le monde est humain.

C’était avant la question juive de Fabius.

La tronche pas catholique

J’avoue que quand j’ai entendu les médias quelques jours plus tard, je me suis dit, ai-je bien fait ? M’étais-je pas trompé ? Là, il ne pouvait pas y avoir d’excuses. J’ai lu, j’ai attendu. Et petit à petit, je recommence à voir des indices qui me conforte dans ma position.

Non, l’homme est fidèle à lui même. Non il n’est pas antisémite. Oui il s’agit encore d’une dérive intello parisienne. Oui, il y a des raisons, autre que clientélistes, de aprtager le ressentiment des socialistes locaux et peut être des électeurs de gauche régionaux.

Car, bizarre, mais comment se fait-ce qu’autant de personnes restent solidaires à ce grand baron du Languedoc ? On peut le comprendre encore en ce qui concerne les socialistes, la fédération de l’Hérault est un bastion bien verrouillé. Mais le soutien du communiste Gayssot, auteur de la loi contre l’expression raciste, antisémite et xénophobe ? Faut-il carricaturer et le traiter de vendu ? En analysant qu’il cherche à conforter son implantation locale pour rebondir au niveau national ?

Il est intéressant d’entendre l’intégralité des propos de Michel Charasse sur France Inter. Soutien d’un homme libre lui aussi exclu par le bureau du PS ? Non car ce n’est pas vraiment un soutien. Mais une mesure : « Je mesure mal l’impact dans les électeurs du Languedoc Roussillon de ce qui est reproché à Georges Frèches » tout en se disant soutenir la politique vers plus de moralité du parti socialiste.

Quand des sites comme Arrêt sur images ou comme Acrimed soulèvent quelques désaccords vis à vis de l’ambiance médiatique sur cette affaire, est-ce juste l’éternel soupçon sur le complot du 4eme pouvoir qui s’exprime ? ou ne peut-on réellement s’interroger sur les procédés ?

On se met alors à écouter l’intégralité des propos de Georges Frèche repris sur le journal local Montpellier journal.

C’est là que l’on voit qu’il y a plusieurs manière d’interpréter « la tronche pas très catholique ». Oui quand on isole l’expression comme cela, en noir sur blanc, à l’écrit, « Il a une tronche pas catholique ». C’est choquant. D’autant choquant quand j’ai appris la nouvelle que les propos à la radio précisait qu’il venait d’une interview accordée par Georges Frèche à l’express. Or, c’était faux. Il s’agissait comme d’habitude de propos tronqués lors d’une séance publique qui datait de plus de deux mois. Et quand on écoute la bande, on ne s’arrète pas sur la tronche pas catholique. On ne met pas le timbre de la voix dessus. Le timbre est sur le mot qui suit « mais… ». Il a une tronche pas catholique, mais… » ça fait rien, peut être que je voterai pour lui.

Se rassurer sur sa moralité

Ce décortiquage de mots, dont la presse est friande (le Monde publie d’ailleurs en décembre un autre « dérapage »), pris en dehors de tout contexte, permet des exégèses simplistes. En rendant les choses manichéennes, certains en profitent pour rassurer, et se rassurer, sur leur moralité qui est malmené tous les jours par la complexité du monde. Quand quelqu’un est désigné comme le Mal, quelle facilité et quel plaisir de se sentir dans le camps du Bien et de participer au lynchage.

Mais il faut dénoncer cette manière de faire, car justement, en se donnant bonne conscience face à des épouvantails, cela ne permet pas de se questionner. Pour les médias, se questionner sur son rapport au pouvoir, sur sa passivité sur les stratégies gouvernementales quand ils ne les relayent pas (le communication sur le débat identité nationale ou sur la peur de la grippe A). Pour les politiques, se questionner sur leur vision politique. Le moralisme ne peut dispenser d’une reflexion sociale, économique. Martine Aubry ne va quand même pas se targuer de gagner les régionales car elle s’est opposé « au nouveau Lepen ».

S’il doit y avoir un jugement, autant qu’il se fasse de manière mesuré, sur dossier et avec tous les éléments. Dans son interview Charasse glisse : Ce n’est pas la première fois que Georges Frêche a ce type de propos, or il n’a jamais été condamné pénalement. intéressant.

George frèche n’est pas antisémite. Il est certainement populiste. Même si je n’aime pas souvent les populistes, j’avoue que j’ai eu un peu le coeur serré en écoutant l’homme vasciller le 3 février.

Filed under: Opinions, Philosophie, Politique | Posted on février 8th, 2010 by rollover

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