Peut-on perdre avec le sourire ? (4)
ou ma proposition de grand A
Le PS va se rénover. Tout le monde est d’accord là dessus, mais derrière le mot rénovation tout le monde ne mets pas le même contenu. Ce qui est malheureux, c’est qu’avec la nouveauté de l’effondrement de l’extrème gauche, confirmé par les législatives, les militants socialistes sont maintenant résignés à la nécessaire blairisation de leur parti, résignés par désespoir alors qu’une refondation par adhésion est nécessaire. Comment convaincre les électeurs quand on est soi-même pas convaincu ?
L’objectif de mes posts est de faire partager mon optimisme, car je pense qu’il y a matière à reconstruire une offre politique alternative à la droite tout en n’ayant pas le deuil du socialisme marxiste. Pour moi la droite ira vers l’échec car elle ne veut pas voir la complexité sociale mais pour la battre, il faut mobiliser les valeurs de gauche qui ont aussi été trahies par les marxistes.
Selon moi, la gauche doit renouer avec sa confiance dans les individus, dans l’internationalisme et dans la foi en l’avenir.
1.La confiance dans les individus
Philosophiquement, la droite considère l’individu comme mauvais. On peut le voir dans le domaine religieux ou économique. Pour elle, l’homme est un loup pour l’homme, il a un pêché originel à se faire pardonner et la recherche maximale de son profit ou de son plaisir permet de prévoir l’avenir économique. Grace à Rousseau, on a réussit à contester cette représentation grâce à deux idées : 1) l’homme est bon par nature, c’est la société qui le pervertit 2) l’homme, pour vivre, doit nécessairement conclure un contrat social. L’individu n’est donc pas mauvais car il est bon par essence, et il a le soucis du bien commun.
En pratique, face à un problème, la droite va focaliser l’attention sur les « profiteurs ». Ainsi, lors de la réforme de la sécurité sociale, on a attaqué les usagers qui consommaient trop. On a mis en place une nouvelle carte vitale, ultra sécurisée, pour lutter contre les fraudeurs. La nouvelle carte vitale coûtera plus cher que ce qu’elle rapportera. Car on évalue le nombre de fraudeurs à moins de 20 000. Une pécadille pour une modernisation coûteuse de notre morceau de plastique vert.
Sur la question de l’emploi, ce seront les chômeurs assistés qui seront le coeur des préoccupations. Et il faudra tout faire pour les remettre au travail.
A la politique des boucs émissaires, l’homme de gauche devrait avancer la priorité de réforme du système.Car pour l’homme de gauche, s’il y a un problème, c’est parce que le système ne permet pas aux individus de contribuer comme ils le souhaitent. Ce ne sont pas des profiteurs dont il est question, mais des exclus. Il s’agira donc, dans le domaine de l’emploi, d’aider à la modernisation du système de formation (réconcilier l’école avec le marché du travail, organiser la formation professionnelle tout au long de la vie pour permettre ceux qui sont sortis trop tôt du système scolaire ou ceux qui s’ennuie dans leur travail, de progresser et d’évoluer dans sa carrière) c’est aussi rendre plus fluide l’emploi (en sécurisant non le contrat de travail mais les parcours professionnels, c’est ce qu’on appelle la sécurité sociale du travail). Dans le domaine de la santé, il s’agira de mettre tout le monde autour de la table les usagers, mais aussi les labos, les médecins, les hôpitaux, afin de mettre chacun devant ses reponsabilités, et de déterminer quel coût on doit consacrer à la santé et vers quelles priorités. Il s’agira aussi de mettre sur la table le rôle du financement qui dépend aujourd’hui des travailleurs alors que les retraités bénéficient le plus des soins. Ainsi, la santé ne devrait-elle pas être financée par l’impôt sur le revenu, qui touche toute la communauté proportionnellement à ses moyens, et non par les cotisations sociales ?
Certains pourraient objecter que la droite à ces projets dans ses cartons. Je n’y crois pas. Car pour mettre en place ces politiques, il faut avoir confiance dans les individus, avoir confiance dans leur sens du bien commun, et cela la droite en est incapable.
La gauche marxiste aussi, car même si elle pourrait être d’accord sur la finalité, sa manière de faire l’empêche d’aboutir à ces solutions. Car la gauche marxiste, elle aussi, n’a pas confiance en l’individu. Aujourd’hui elle interprète la crise par la montée de l’individualisme. Elle aussi cherche des boucs-émissaires, ce ne seront plus les exclus, les profiteurs seront les possédants. Les responsables sont les chefs d’entreprise, les médecins. La gauche marxiste a empêché le dialogue social car elle a façonné le syndicalisme comme un contre-pouvoir contre les patrons. Le syndicalisme a donc été perçu, et est toujours perçu, comme une force d’opposition contestatrice au service d’une catégorie.
En ayant une vision positive de l’individu, le syndicalisme n’est plus un instrument de lutte, la défense d’une catégorie, mais le moyen de permettre à chacun de se faire entendre par la direction, faire remonter les problèmes concrets qui empêchent les salairés de travailler et nuisent à la productivité de l’entreprise.
A la lutte des classes, le dialogue social doit se substituer. Au niveau politique, cela veut dire faire confiance aux citoyens. Les socialistes ont mis en place la démocratie participative avec la loi dite « démocratie de proximité ». Mais les élus, même de gauche, ont encore beaucoup de mal à faire confiance, le système des comités de quartier doit être amélioré et il est nécessaire de continuer à approfondir la démocratie participative pour qu’elle ne se contente pas de représenter les milieux aisés culturellement.
Le dialogue social, c’est aussi avoir un rapport différent à la hiérarchie. L’objectif n’est pas de revenir sur mai 68 et renforcer l’autorité sous couvert de respect. A l’école, c’est admettre pour un professeur qu’on peut avoir tord, qu’on ne connait pas tout, que chacun peut avoir quelque chose à dire car nous sommes tous nés dans un contexte différent, dans un lieux différent, dans un milieu social différent. Et c’est le meilleur moyen pour l’enseigné mais aussi l’enseignant de se questionner sur son rapport à l’histoire, son rapport à la citoyenneté, son rapport au travail. La pédagogie prend du temps, et c’est pour cela qu’il faut remettre en cause des programmes abrutissant car ils sont lourds, obligent de traiter beaucoup de choses de manière superficielle, et empêche la réflexion. En Suède, la réfome de l’enseignement a la mise en place d’objectifs peu nombreux mais précis. A l’heure d’Internet, l’important n’est plus d’avoir accès au contenu mais d’avoir suffisamment de recul pour pouvoir exploiter ce contenu.
Le dialogue social et la confiance dans l’individu peuvent se décliner dans beaucoup de thèmes que le discours sur le retour à l’autorité empêche de voir. Au lieu de concurrencer la droite sur ce terrain, je pense que la gauche devrait plutôt réfléchir dans ce sens.
(A suivre)
Tags: droite, présidentielles 2007, social-democratie, socialisme